BELLANGÉ Alexandre
Alexandre Bellangé - ébéniste à Paris. Fils et élève de Pierre-Antoine Bellangé, il fonda du vivant de son père une fabrique d'ébénisteries à Paris, dans le faubourg Saint-Martin, rue des Marais. De ses ateliers provient un cabinet, orné de bronzes dorés et de plaques de Sèvres.
Alexandre-Louis Bellangé, qui préférait se faire appeler Alexandre, naquit à Paris le 18 messidor an VII (6 juillet 1799) de Louis-François Bellangé (1759-1827), menuisier ébéniste établi, jusqu'en 1818, au 41, faubourg Saint-Martin, puis au 33, rue des Marais. Louis-François se retira probablement des affaires à la fin de l'année 1822 ou au début de l'année 1823, son fils Alexandre lui succédant, rapidement associé, dès 1825, au « fabricant de bronzes » Jean-Toussaint Monvoisin (1780-1842), l'époux de sa soeur Madeleine-Sophie.
Alexandre Bellangé avait reçu sa formation auprès de son père. Quand il prend la suite de l'entreprise familiale, il inaugure une production qui s'inscrit dans la continuité de celle de son père, notamment pour la production de mobilier « de curiosité », mais marquée par un style propre. Le mobilier « de curiosité » était prisé moins pour son utilité, sa seule beauté ou sa cohérence avec le goût ambiant que pour être le support d'éléments décoratifs rares, du fait de leur caractère historique ou de leur nature. Les mêmes modèles, déclinés selon les mêmes silhouettes et structures, chez le père et le fils, révèle la volonté des collectionneurs de posséder un objet intégrant ces éléments rares, comme les porcelaines, les laques, tout en évoquant des références à l'ébénisterie de luxe des XVIIe et XVIIIe siècles.
Le rôle des marchands de curiosités dans la diffusion du mobilier de Louis-François et Alexandre Bellanger en France et en Grand-Bretagne est donc déterminant, et plus particulièrement de Rieul Rocheux, Alexis Delahante ou surtout Philippe- Claude Maëlrondt, qui semble avoir même fourni à Alexandre Bellangé des porcelaines peintes, des laques, des pierres rares et l'idée de certains modèles.
La paire de secrétaires en cabinet du musée des Arts décoratifs présente une partie supérieure en caisson, ouvrant à abattant, cantonné de deux colonnes cannelées à chapiteaux corinthiens, orné d'un panneau de laque et encadré d'une bordure de labradorite. Deux paires de colonnes cannelées forment le soubassement, qui repose sur des pieds en toupie modernes. Les parties plaquées d'acajou (fond, côtés du cabinet et ceinture) sont compartimentées par des baguettes en bronze doré. Par leur silhouette et leur typologie, ils peuvent être rapprochés d'exemplaires de secrétaires en cabinet produits par Louis-François Bellangé.
Cinq exemplaires peuvent être mentionnés.
Les deux premiers, qui forment une paire et portent, dans leur estampille, la mention de l'adresse 41, faubourg Saint- Martin, excluant une production postérieure à 1818, sont actuellement conservés dans la collection de Sa Majesté la reine Elizabeth II, à Buckingham Palace, à Londres (inv. RCIN 2483). Ils présentent la même structure en deux parties, les mêmes colonnes cannelées couronnées de chapiteaux corinthiens en soubassement.
Un troisième exemplaire, qui n'est plus connu que par une ancienne photographie et une gravure publicitaire américaine de la fin des années 1880, était décrit dans le catalogue de la vente après décès de la collection du marchand Philippe-Claude Maëlrondt, le 15 novembre 1824, sous le lot 326 : « un très beau meuble secrétaire à deux parties, fait par M. Bellangé ; la partie inférieure, composée de six colonnes et de quatre pilastres, à cannelures en cuivre doré, garni de deux glaces, la partie supérieure ouvrant à un abattant, garnie de douze tiroirs ; cette partie est enrichie de quatre plaques en porcelaine moderne, représentant des paysages et différents sujets, et de dix autres plaques en ancien Sèvres, à guirlandes de fleurs ; elle est aussi garnie de deux cariatides, et autres ornemens en bronze doré. »
Le quatrième, qui a appartenu au J. Paul Getty Museum avant d'être vendu chez Christie's en 1996, passant par deux antiquaires parisiens avant d'être vendu à nouveau chez Sotheby's à New York en novembre 2006, est aujourd'hui dans une collection privée. Il reprend la construction des secrétaires en cabinet de Buckingham Palace mais la nature du décor est différente, puisqu'il comprend dix plaques de porcelaine sur l'abattant, dont une plaque centrale en médaillon horizontal représentant une nature morte de fruits, les autres réparties en encadrement, peints à l'or sur fond bleu. Deux autres plaques en médaillons, verticales, à motifs de bouquets, ornent les côtés. Un placage d'amarante et d'ébène est rehaussé d'étain, de bronzes dorés, et la tablette est en granit.
Le cinquième, presque similaire au précédent à l'exception de la frise supérieure, de l'absence de plinthe sous les pieds en toupie et du décor de porcelaine, vert et non bleu, qui montre une scène galante probablement inspirée de Cimone et Efigenia du Decameron de Boccace, n'est plus aujourd'hui connu que par une photographie. Il avait appartenu un temps à la duchesse de Berry. Les placages de laque semblent assez rares chez Louis-François Bellangé. Ils sont plus fréquents chez Alexandre, auquel sont attribués les deux secrétaires en cabinet du musée des Arts décoratifs.
Déclinant des modèles proches de ceux réalisés par son père, comme en témoigne, par exemple, une vitrine en cabinet non localisée vendue chez Christie's à Londres en mars 1977 (lot 44), ornée par ailleurs de plaques de porcelaine, Alexandre Bellangé sut renouveler les matériaux employés en placage, comme le révèle l'usage de labradorite sur les exemplaires lyonnais, ou de nacre, sur une paire de vitrines en cabinet provenant de l'ancienne collection William Lowther, vendue chez Christie's à Londres en mai 1912 (lot 107 : A pair of Directoire Show-Cabinets, of mahogany, mounted with or-moulu borders and supported by Corinthian columns with or-moulu capitals, with fall down glass door in the upper-part, the borders overlaid with plaques of mother-o'-pearl and enclosing an architectural centre - 62in. high, 35in. wide) et acquise par la galerie londonienne Wills and Simmons mais non localisée aujourd'hui.
Louis-François comme Alexandre Bellangé empruntent la plupart de leurs décors, de leurs ornements en bronze et certaines de leurs silhouettes aux XVIIe et XVIIIe siècles. Pourtant, ébénistes « en curiosités », ils ne se contentent pas de refaire, comme certains artisans de la seconde moitié du XIXe siècle, des meubles à la façon de Boulle, Riesener ou Carlin. Au contraire, ils produisent des meubles écrins, supports d'éléments de décors pourvus d'une tonalité historique évidente leur conférant un statut de curiosité précieuse, accompagnant, par leur exotisme chronologique, les authentiques meubles des siècles passés dans les intérieurs luxueux, en France, chez les collectionneurs et les amateurs de la Restauration, ou en Grande-Bretagne.
Pierre Lemaitre
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